Fin de mission du cabinet : quand l’indemnité de rupture est due

Une cour d’appel considère que la lettre de rupture d’un client ne peut permettre une non reconduction tacite du contrat, en raison d’une dénonciation tardive, et a interrompu la mission en cours d’exécution. Dès lors, le cabinet comptable a droit à une indemnité de rupture.

Interruption de mission ou non reconduction ? La différence est d’importance car ces deux situations courantes dans la vie de tout cabinet comptable ne sont pas soumises aux mêmes règles. Dans une affaire récemment soumise en appel, cette qualification conditionne le versement ou non d’une indemnité de rupture au profit du cabinet.

Deux positions différentes

Que s’est-il passé ? Un bureau d’études a mis fin à la mission de son expert-comptable par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) du 31 janvier 2013, « à compter de l’édition du bilan se clôturant [comme chaque année] le 31 mars 2013 ». Souhaitant ainsi ne pas reconduire la mission pour l’exercice courant du 1er avril 2013 au 31 mars 2014.

Le cabinet comptable lui a répondu le 12 février 2013 qu’il cesserait ses interventions dès le 28 février, estimant pour sa part être en présence d’une interruption de mission en cours. Toutefois, la société cliente lui a adressé trois virements d’honoraires de mars à mai pour un montant de près de 9000 euros. Alléguant une erreur, elle assigne l’expert-comptable en remboursement de cette somme et à des dommages et intérêts.

Pas de faute de l’expert-comptable

Les juges donnent raison au professionnel du chiffre. En effet, la lettre de rupture du client a été envoyée trop tardivement pour permettre une non reconduction tacite. Le contrat aurait dû, pour ce faire, être dénoncé trois mois avant la date de clôture de l’exercice, soit au plus tard le 31 décembre 2012 (selon l’article 7 des conditions générales d’intervention établies par l’Ordre des experts-comptables). Sa dénonciation tardive du 31 janvier 2013 a donc eu pour effet de reconduire le contrat jusqu’au 31 mars 2014.

Ainsi, la mission a bien été interrompue en cours d’exécution, sur l’initiative du client, estime la cour d’appel de Versailles. Concernant la date de fin de la mission, les magistrats considèrent que la société cliente ne peut, « à sa guise, en fixer le terme qui lui convenait », de sorte qu’en arrêtant sa mission le 28 février 2013, le cabinet comptable a respecté le préavis d’un mois fixé à l’article 5 des conditions générales (applicable aux interruptions de mission) et n’a donc commis aucune faute, ni décidé de la rupture des relations contractuelles. Pour rappel, le client ne peut interrompre la mission en cours qu’après en avoir informé l’expert-comptable par LRAR un mois avant la date d’effet de la rupture.

Conséquence : le cabinet se verrait verser une indemnité de rupture égale à 25% des honoraires convenus pour l’exercice en cours (comme le prévoit l’article 5 des conditions générales). Soit 2990 euros (compte tenu des acomptes d’honoraires de 8970 euros déjà versés). Il aurait également droit à une indemnité de procédure de 3000 euros. Nous ne savons pas si la société cliente s’est pourvue en cassation.